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21 décembre 2018
Auteurs et autrices : César Dugast

COP24 et action du secteur privé : jeux de miroirs

Par Renaud Bettin, et César Dugast

Les COP, rendez-vous annuels des États pour dessiner la gouvernance mondiale du climat, demeurent essentielles. Mais la boussole de l’action étatique semble perdre le Nord, et l’inversion des pôles de l’ambition est en marche. Retour sur la COP24 et ses jeux de miroir entre l’action étatique en panne d’ambition et l’action non-étatique, dont Carbone 4 et ses clients font partie.

Ambition : Aller plus haut

L’enjeu : Les contributions volontaires des États mènent la planète vers un réchauffement de plus de 3°C d’ici la fin du siècle par rapport aux temps pré-industriels. Dans un contexte de croissance des émissions mondiales mise en lumière par le dernier Emissions Gap Report de l’UNEP, l’un des enjeux de cette COP était de revoir à la hausse l’ambition des Parties en matière d’objectifs de réduction d’émissions. Idéalement, le texte final de la COP24 inscrivait plusieurs enseignements du rapport spécial du GIEC, notamment, celui d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Le résultat de la COP : Il y eut à nouveau une forme de négation de la réalité scientifique et donc un fossé toujours plus grand entre l’ambition nécessaire et la volonté politique : les Parties ont seulement « pris note » du rapport du GIEC refusant de l’« accueillir favorablement ». 50 pays envisagent de revoir à la hausse leurs objectifs mais seules les îles Marshall ont proposé un NDC réactualisé. Ce que fait Carbone 4 : Le secteur privé, dont on sait la part de responsabilité dans le dérèglement climatique, doit lui aussi revoir à la hausse ses ambitions de manière concrète. L’initiative « Science Based Targets », créée justement dans le but d’aider les entreprises à se fixer des objectifs de réduction compatibles avec l’Accord de Paris, se pose aujourd’hui la question de réactualiser ses trajectoires en fonction de l’objectif 1,5°C. Carbone 4 accompagne ses clients dans l’élaboration de ses trajectoires ambitieuses de réduction de leur empreinte carbone. 

Accord de Paris : Mode d’emploi

L’enjeu : Les règles techniques de la mise en œuvre de l’Accord de Paris devaient être établies. L’objectif était d’harmoniser les contributions nationales (contenu, calendrier) afin d’organiser au mieux le bilan mondial quinquennal, tout en renforçant des règles de transparence. Le résultat de la COP : Cette notice d’application de l’Accord, ou Rulebook, a finalement été adoptée et il s’agit là d’une réelle avancée. Les États disposent désormais d’un cadre commun de reporting indiquant les années de référence, indicateurs de progrès, méthode de comptabilisation, utilisation de transferts de crédits internationaux, actions d’atténuation, d’adaptation, etc. Il permettra de suivre leurs contributions et leurs avancées vers la neutralité carbone, notamment au travers d’un inventaire national de leurs émissions de gaz à effet de serre. Un pas important vers plus de clarté et de transparence qui doit favoriser la confiance mutuelle entre les Parties, conditions indispensables à l’efficacité de l’action mondiale. Ce que fait Carbone 4 : Le secteur privé a lui aussi besoin d’un langage commun pour communiquer de manière claire et harmonisée sur les actions prises en faveur du climat. C’est la raison de la création par Carbone 4 et ses partenaires de Net Zero Initiative, un réseau unique d’acteurs déterminés à adresser la question cruciale de la neutralité carbone, et dont le premier travail consiste à construire un référentiel commun, ambitieux et scientifiquement robuste vers le « net zéro » des entreprises.  

Financement : Money, Money, Money

L’enjeu : C’est le nerf de la guerre Nord-Sud. Au cœur de cet enjeu, l’équité, la justice climatique et la « responsabilité commune mais différenciée ». La COP24 devait voir de nouveaux engagements en matière de financement des pays du Sud par le Nord. L’objectif des 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 gravé dans l’Accord de Paris reste plus que jamais d’actualité. Le résultat de la COP : Au-delà des sommes promises au Fonds d’adaptation qui ont atteint un record (129 millions d’euros), le Rulebook impose des critères plus rigoureux et exigeants aux investissements, sans rentrer dans les détails. Des ressources nouvelles et additionnelles sont toujours attendues au vu des 300 milliards de dollars par an d’ici 2030 qui seront nécessaires pour que les pays les plus vulnérables s’adaptent aux conséquences du réchauffement planétaire. Ce que fait Carbone 4: La finance et l’adaptation, deux « nerfs de la guerre » que Carbone 4 traite à sa manière. Tandis que notre filiale Carbon4Finance propose un service unique au monde de données climat à destination du secteur financier, notre pôle Adaptation a récemment lancé MyCris, un outil innovant d’évaluation des risques physiques des entreprises en fonction de leur implantation géographique et leur secteur d’activité.

Coopération carbone

L’enjeu : L’Article 6 de l’Accord de Paris esquisse la suite du Mécanisme de Développement Propre (MDP) du protocole de Kyoto, qui permet actuellement aux pays développés d’acquérir des crédits d’émissions en finançant des projets dans des pays en développement. L’objectif de la COP24 en définissant les règles de ces nouveaux mécanismes était de définir un système fiable de comptabilisation afin d’éviter que les émissions ne soient pas comptabilisées deux fois (par les pays achetant et par ceux vendant des crédits). Le résultat de la COP : Malgré un travail précieux mené tout au long des deux semaines par les négociateurs, le texte relatif à l’Article 6 sur les échanges internationaux de quotas et de crédits carbone a été totalement vidé de sa substance, notamment par le Brésil. Le sujet sera à nouveau traité au Chili en novembre 2019, lors de la prochaine COP. Ce que fait Carbone 4 : Les marchés des crédits carbone sont des mécanismes précieux permettant un financement cost effective des actions de réduction d’émissions à l’échelle mondiale. Mais l’utilisation abusive de crédits de « compensation » volontaire par le secteur privé, ainsi que le manque criant de transparence dans les marges touchées par les intermédiaires, a abîmé la crédibilité et la confiance dans ces mécanismes, tant du côté des entreprises utilisatrices que par les acteurs de terrain au Sud. Net Zero Initiative plaide pour davantage d’efficience de ces marchés et cherche à maximiser les retombées sur le terrain du financement climat.   

Sources : https://theconversation.com/cop24-que-penser-du-resultat-108949 https://theconversation.com/cop24-un-accord-tres-technique-mais-peu-ambitieux-108931


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