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8 janvier 2020

Convention Citoyenne pour le Climat : quels objectifs et quelles solutions pour la mobilité ?

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Par Célia Foulon – Consultante

Depuis début octobre, les 150 citoyens et citoyennes tirés au sort travaillent à des propositions pour réduire les émissions de la France de 40% d’ici à 2030, sans négliger la justice sociale [1]. La mobilité est évidemment un des sujets clés du débat, sur lequel les 150 membres de la Convention Citoyenne ont été formés. C’est donc l’occasion de revenir sur les enjeux du secteur afin que, comme les 150 citoyens tirés au sort, vous ayez en tête les bons chiffres et ordres de grandeur.

1/ État des lieux des émissions françaises et zoom sur la mobilité : En compilant les données du CITEPA [2], les chiffres clés du climat MTES [3] et les Comptes des Transports du SOeS [4], on peut répartir les émissions françaises de la façon suivante : 

Le transport est la première source d’émissions de gaz à effet de serre (GES) en France (tous gaz confondus) avec une part de 30% du total. On constate que les voitures sont à elles seules responsables de 53% des émissions liées au transport (NB : seuls les vols domestiques sont pris en compte dans les émissions aériennes de la France. Il faudrait multiplier ces émissions par 5 pour tenir compte des vols internationaux au départ de notre pays [5]).

2/ Tendances actuelles et objectifs à atteindre : D’après la Stratégie Nationale Bas Carbone, les émissions de GES sur le territoire français ont baissé entre 1990 et 2019 (on a délocalisé une partie significative de notre industrie donc ça y contribue, mais on a fait quelques réels progrès aussi, notamment dans le secteur énergétique). Si on se focalise sur le transport, à l’inverse de tous les autres secteurs, on observe une légère hausse des émissions depuis 1990. Pourquoi ? Parce qu’on est de plus en plus dépendant de la voiture et que nos trajets quotidiens (notamment la distance domicile-travail) s’allongent. Mais aussi parce que les voitures sont de plus en plus lourdes, ce qui annule les progrès techniques réalisés sur les moteurs. 

En 2050, si on veut respecter les Accords de Paris et limiter le réchauffement à 2°C ou moins, la France (et au-delà l’Europe) va devoir drastiquement réduire ses émissions. Pour cela, le transport ne devra quasiment plus émettre du tout de gaz à effet de serre en 2050 ! Seul le transport aérien domestique pourra encore être à l’origine de quelques émissions, car c’est pour ce mode que les alternatives aux produits pétroliers sont les plus dures à mettre en œuvre. Et c’est pour l’instant mal parti. À ce propos, le Haut Conseil pour le Climat alerte : « Les évolutions structurelles associées au scénario de la première Stratégie Nationale Bas Carbone sont beaucoup plus lentes qu’anticipé. Ainsi, pour le transport de voyageurs, la demande a crû près de trois fois plus vite qu’anticipé (croissance de 1,1% par an contre 0,4 % prévu), l’électrification du parc automobile est en retard (2,1% en 2018 contre environ 9% prévu). Il n’y a pas eu le report prévu vers le rail, les modes actifs (vélo, marche, etc.) ou les transports en commun. S’agissant du transport de marchandises et véhicules utilitaires légers, les émissions n’ont pas évolué. » [6]

3/ Les solutions de décarbonation : Mais comment parvenir à une telle réduction alors que les émissions des transports sont aujourd’hui à la hausse et que l’on a pris du retard sur les trajectoires souhaitées ? Les émissions du transport répondent à l’interaction de 4 paramètres sur lesquels nous pouvons jouer : 

  • Les flux de transport : réduire le nombre de voyages, et/ou le nombre de personnes et de produits transportés, et/ou les distances parcourues. A titre d’exemple, la SNBC invite à favoriser le télétravail et le covoiturage pour limiter la croissance de la demande.
  • Le mode de transport : le report modal des transports carbonés (avion, camion, voiture, …) vers les transports moins carbonés (bateau, train, vélo, marche, …).
  • Les effets d’intensité : une amélioration de l’efficacité énergétique couplée à des meilleurs taux de remplissage. La SNBC préconise d’atteindre 4L/100km d’ici à 2030, en conditions réelles (contre plus de 6L/100 km en 2018), pour les véhicules particuliers thermiques [7].
  • les vecteurs énergétiques : opérer une substitution des hydrocarbures fossiles vers des énergies moins carbonées. La SNBC préconise ainsi d’arriver à 35% de ventes de véhicules électriques (batteries ou hydrogène) en 2030, puis 100% en 2040 [7].

Les 150 citoyens participants à la Convention Citoyenne ont bien compris ces enjeux et proposent d’approfondir en particulier 4 types de mesures [8] : 

  • Modifier l’utilisation de la voiture individuelle : favoriser les moyens alternatifs, interdire la voiture en ville, réduire la vitesse sur autoroute et réguler la publicité automobile.
  • Réduire et optimiser le transport de marchandises sur route : ferroutage, taxation des poids lourds sur la route, développement des circuits courts.
  • Agir sur la réglementation : normes sur les véhicules et le transport maritime, accompagnement de la mutation de la flotte de véhicules dans les dix ans à venir…
  • Permettre aux ménages français de vivre avec moins de voitures grâce à plus de services et permettre la présence de citoyens dans les autorités organisatrices de mobilité.

 A ce stade, cela relève plus de l’incantation, mais il faut donner du temps aux participants pour poursuivre les travaux :  affaire à suivre pour savoir quelles seront les propositions concrètes retenues, comment elles seront mises en place, et comment elles seront perçues par les Français.

Article rédigé par Célia Foulon – Consultante 

Sources : [1] La Convention Citoyenne [2] CITEPA [3] Chiffres clés du Climat [4] Comptes des transports [5] CCTN [6] Rapport du Haut Conseil pour le Climat pour la Convention Citoyenne [7] Résumé de la SNBC [8] AEF


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