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9 juillet 2019
Auteurs et autrices : Rodrigo Baranna

Le dispositif bonus / malus : instrument économique pour la décarbonation du secteur automobile

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Par Rodrigo Baranna, consultant 

Le bilan 2018 du dispositif de bonus/malus pour le marché automobile en France a révélé que le mécanisme demeure au global bénéficiaire pour l’État français. Même si les dépenses publiques liées au bonus pour l’acquisition de voitures à faibles émissions de CO2 et à la prime à la conversion ont atteint des niveaux records, les recettes provenant des malus sur les voitures plus émissives ont accompagné la dynamique de hausse. Ainsi, pendant que les dépenses de bonus se sont élevées à 550 millions d’euros, les recettes de malus les ont dépassées de 8,9 millions d’euros, pour un total de 558,9 millions d’euros [1]. Du côté des dépenses, la prime à la conversion sur les voitures électriques avait été réduite de 4 000€ à 2 500€ [2] et le bonus écologique limité aux voitures émettant jusqu’à 20 gCO2/km [3]. Dans l’année précédente, les voitures émettant de 21 à 60 gCO2/km pouvaient bénéficier également d’un bonus, celui-ci étant moins important (1 000€) que pour les véhicules 100% électriques (6 000€) [4]. 

Ces deux changements n’ont pourtant pas empêché l’augmentation du montant total versé par l’État en 2018. En contrepartie, les primes à la conversion avaient été étendues à tous les ménages (elles étaient limitées aux ménages non-imposables en 2017) et aux voitures d’occasion. De plus, les primes sur les voitures thermiques neuves avaient été revues à la hausse, passant de jusqu’à 1 000€ en 2017 à jusqu’à 2 000€ en 2018 [2]. Du côté des recettes, la progression des malus en fonction des émissions avait été maintenue. En revanche, au lieu de démarrer à 50€ pour les voitures émettant 127 gCO2/km comme en 2017, le malus démarrait à 50€ pour un niveau d’émissions de 120 gCO2/km en 2018, ce qui a fait qu’un nombre plus important de modèles a été concerné. Une autre évolution avait porté sur le plafond du malus qui est passé de 10 000€ à 10 500€ [5] [6]. 

La décarbonation des transports routiers constitue un des leviers importants pour la transition énergétique et écologique de la France. Le fait que ce dispositif soit toujours bénéficiaire peut indiquer que les aides ne sont pas assez attractives pour inciter l’acquisition des voitures moins émissives et/ou que les malus ne sont pas assez dissuasifs pour l’achat de véhicules très énergivores. Le succès rencontré par les SUV (quasiment 40% des ventes de voitures neuves en France en 2018) tend à favoriser cette dernière hypothèse, hélas. Étant donné que les technologies à faibles émissions de CO2 sont considérées par les acheteurs comme encore trop chères par rapport aux véhicules thermiques (ce qui est contestable du point de vue purement rationnel de l’analyse de TCO), la mise au point de cet instrument est essentielle pour déclencher une dynamique favorable à la pénétration de ces technologies dans le marché français. Pour l’année 2019, des nouvelles règles sont applicables, à la suite des décisions prises en réaction au mouvement des Gilets Jaunes, principalement. Les malus sont maintenant applicables à partir d’un niveau d’émission de 117 gCO2/km. En contrepartie, les valeurs ont été revues à la baisse et dans la plupart des cas, pour un même niveau d’émission, le malus est plus faible en 2019 qu’en 2018 [7]. 

En ce qui concerne les primes à la conversion, des nouveaux cas sont prévus et elles peuvent atteindre jusqu’à 5 000€ pour les ménages moins aisés ou pour des grands rouleurs. Le bonus écologique reste inchangé [8]. Ces nouveaux critères et valeurs permettront-ils au dispositif de trouver son équilibre ? Et encore plus important, ce mécanisme sera-t-il capable d’inscrire le secteur automobile français dans une trajectoire de décarbonation compatible avec l’Accord de Paris ? Nous aurons l’occasion d’en reparler, très certainement. Article rédigé par Rodrigo Baranna – Consultant 

Sources: [1] Motor Legend [2] Auto Plus [3] FFB [4] Le Figaro [5] L’Argus [6] Auto Plus [7] Droit-finances [8] Ministère de la Transition Écologique et Solidaire


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