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4 juillet 2022
Auteurs et autrices : Clément Mallet

Quelle mobilité dans le “monde d’après” ?

La mobilité en ville après 2 ans de crise COVID - Etude de cas à Rennes et Nancy grâce aux données Mobility Patterns

- Article co-rédigé par Carbone 4 et Mobilty Patterns (Hove) [7]
 

Le 11 mai 2022, nous fêtions le deuxième anniversaire de la fin du premier confinement. Après 2 ans, nos habitudes de mobilité ont-elles significativement changé à la suite de la crise sanitaire ? Et surtout quels sont les impacts sur les émissions de gaz à effet de serre, directement émises par nos déplacements ? Au-delà des retours d’impressions et de cas personnels, Carbone 4 et Patterns proposent une analyse basée sur des données de mobilité constatées quotidiennement, pour appréhender ces évolutions, en prenant en compte l’évolution des offres de transports réellement déployées.

Pour ce premier cas d’usage, une grande agglomération (Rennes Métropole) et une moyenne (Métropole du Grand Nancy) ont été sélectionnées. Les déplacements[1] relevés en février 2020 ont été comparés à ceux de février 2022.

La méthode utilisée

La mesure est basée sur un échantillon[2] de trajets issus de la géolocalisation de smartphones, collectés à partir d’un panel d’applications mobiles variées. La précision de la géolocalisation permet de dissocier les modes de transport empruntés et de calculer les distances de parcours associées. Plus précisément, un algorithme d’allocation modale compare la compatibilité horaire et spatiale avec les différents itinéraires modaux possibles (transports en commun, vélo, marche ou véhicule personnel), pour accéder au détail du parcours emprunté : par exemple, un usager passant par les pistes cyclables est probablement à vélo et un usager superposé aux parcours et horaires exacts du bus, probablement en bus. 

Les émissions en CO2 équivalent sont ensuite estimées en liant cette distance avec les émissions de chaque mode, ramenées au voyageur-kilomètre[3]. Pour les déplacements utilisant les transports en commun, ces émissions dépendent fortement du taux de remplissage réel, qui a été calculé quotidiennement sur chaque ligne de transport.

Un redressement statistique, basé sur des données socio-démographiques, permet une estimation des distances et émissions équivalentes de l’ensemble de la population[4].

Quels enseignements nous apportent ces données ?

Tout d’abord en termes de distances parcourues, on observe au final assez peu de changement: une légère hausse des distances totales (3,7%) à Nancy et une légère baisse (-3,5%) à Rennes. Dans les deux villes, on constate que le recours aux transports en commun a diminué. En absolu comme en relatif, les trajets à pied et surtout en transports en commun ont diminué fortement, jusqu’à -32% de km en moins en transports en commun à Rennes. La hausse modérée du trafic vélo/trottinette[5] n’est pas suffisante pour compenser cette désaffection et transport en commun. Ainsi la part des kilomètres parcourus en voiture a augmenté dans les deux villes (passant de 74,1% à 77,6% à Nancy et de 75,9% à 79,7% à Rennes).

Evolution des distances parcourues en jours ouvrables (p.km)

Métropole Grand Nancy
Rennes Métropole

Au global, les émissions sont en hausse dans les deux villes (+10 % à Nancy et +1% à Rennes). En effet, non seulement l'augmentation des trajets en voiture se traduit directement par une hausse quasi proportionnelle des émissions[6] mais les émissions des transports en commun n’ont que peu diminué ou sont restées stables. En effet, pour garantir un service de qualité, l’offre de TC n’a pas ou peu été modifiée, même si la fréquentation a été réduite.

Quelles conclusions en tirer ?

Ces chiffres, certes non exhaustifs puisqu’on parle de deux villes en France et sur deux mois seulement sont toutefois illustratifs d’un constat fort : le “monde d’après” tant évoqué lors de la crise COVID ressemble encore à bien des égards au “monde d’avant”. Beaucoup de voiture et encore trop peu de transport en commun ou de mobilité douce, y compris dans les pôles urbains denses. Les efforts pour poursuivre la réduction de la voiture au quotidien sont plus que jamais nécessaires.


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