Cet article a initialement été publié dans notre newsletter Décryptage Mobilité. Pour recevoir par mail les prochains articles dès leur publication, abonnez-vous dès maintenant. Par Célia Foulon – Consultante
L’association Paris en Selle a publié récemment un rapport très complet afin d’aider les villes (n’importe quelle ville, pas seulement Paris) à devenir plus attrayantes pour les cyclistes [1]. Depuis quelques années, beaucoup de villes investissent dans le développement du vélo, pour des raisons écologiques et sanitaires mais aussi pour des raisons de désengorgement des transports publics et des routes. C’est par exemple le cas d’Amsterdam, qui bien que déjà très cyclable, va renforcer son plan anti-voiture : la ville va adapter son plan urbain afin de rendre impossible une traversée en voiture et de réduire la circulation sur certains axes, rendant plus de places aux piétons et cyclistes. Ainsi, si un automobiliste veut aller d’un bout à l’autre de la ville, il devra en faire le tour plutôt que de traverser par le centre-ville. Un aménagement qui permet de réduire le trafic et donc de rendre les déplacements à pieds et en vélo encore plus sûrs qu’ils ne le sont déjà [2].
Carbone 4 salue et encourage toutes les initiatives prises ces dernières années pour développer le vélo en ville, d’autant que la France est en retard sur le développement de ce mode de transport par rapport aux pays voisins. Le rapport de Paris en Selle est très instructif pour apprendre des réussites et des erreurs de nos voisins : il dévoile les règles élémentaires qui sont à respecter pour développer un réseau cyclable vraiment utile et sécuritaire, et donc permettant l’essor de l’usage du vélo.
En résumé, Paris en Selle met en évidence deux principes essentiels, qui ne vont pas l’un sans l’autre : 1/ la séparation des cyclistes du reste des usagers de la route, et tout particulièrement des voitures ; 2/ l’efficacité du réseau cyclable (c’est-à-dire la rapidité pour le parcourir, permise par un trajet sans détours et sans contraintes ou presque) et donc du mode cyclable par rapport aux autres modes de transport. La séparation des cyclistes du reste du trafic est un paramètre primordial, permettant aux cyclistes de se sentir en sécurité et donc d’avoir envie d’utiliser le vélo pour se déplacer. Une piste cyclable non séparée d’un trafic routier dense ne servira pas au développement de la pratique cyclable, puisqu’une grande majorité de cyclistes ne s’y sentira pas en sécurité et délaissera le vélo. La séparation n’est en fait nécessaire que sur les grands axes de transit automobile présentant un trafic motorisé important (au-dessus d’un seuil de 2 000 véhicules/jour selon Paris en Selle). Sur ces axes, représentant environ 20% du réseau d’une ville, il faut des pistes cyclables physiquement séparées de la route (y compris des voies de bus) par une bordure de minimum 20 cm de large, mais aussi séparées du trottoir. Une différence de niveau entre le trottoir et la piste cyclable est indispensable pour limiter la présence des piétons sur la piste. Autre point important, souvent négligé à Paris : les pistes doivent être assez larges pour éviter les dépassements rasants (stressants et dangereux) entre cyclistes. L’association recommande 2,10m de large minimum, marquage inclus, hors zone de stationnement latéral des voitures. Sur les 80% de rues restantes, qui sont des axes moins fréquentés, l’enjeu est de limiter le trafic automobile et de le ralentir, afin de rassurer les cyclistes. Selon Paris en Selle, ces rues apaisées ne doivent comporter aucun feu et doivent toujours être à double sens pour les cyclistes. Afin de réduire le trafic automobile, il faut que ces voies soient empruntées par des voitures pour les trajets ayant leur origine ou leur destination dans ces zones, tandis que le trafic traversant se rabatte sur les axes principaux. Pour cela, les sens interdits et l’organisation de la circulation sont primordiaux. C’est le sens de ce qui est envisagé par Amsterdam. La séparation du trafic ne doit pas se faire sans efficacité. Le cycliste, afin qu’il utilise les pistes cyclables, ne doit pas avoir le sentiment de perdre son temps, de faire des détours ou de devoir attendre à de multiples feux pour traverser un rond-point (comme c’est trop souvent le cas à Paris aujourd’hui). Dans un environnement urbain saturé, les modes de déplacement sont en concurrence et l’efficacité relative de chaque mode est déterminante dans le choix des usagers. La question à se poser par les villes pourrait alors être celle du jeu à somme nulle : ne faut-il pas empiéter sur l’efficacité du réseau routier pour améliorer celle du réseau cyclable, afin de rendre le vélo plus attractif ? Afin d’assurer la sécurité des cyclistes mais aussi l’efficacité du réseau, il faut assurer la continuité du réseau, notamment lors des intersections (par exemple : marquage au sol visibles des automobilistes, pas de trottoirs à monter ou descendre) et d’éviter de faire changer les cyclistes de côté de la route lors d’un trajet : c’est très perturbant et dangereux, et c’est souvent mal compris des cyclistes qui ne voient pas que la piste a changé de côté et continuent donc sur la route, au milieu des voitures. La séparation et l’efficacité du réseau cyclable sont, d’après Paris en Selle, des principes nécessaires de l’organisation des villes pour généraliser l’usage du vélo, au-delà du cercle des usagers actuels qui se résignent aux conditions, parfois dangereuses et souvent stressantes, de circulation. Le rapport de Paris en Selle donne une multitude d’exemples concrets, avec des mesures précises et des schémas explicatifs. Il est très complet et très bien réalisé et nous le recommandons vivement à toutes les personnes qui sont en charge du développement cyclable d’une ville. N’hésitez donc pas à en parler à votre maire ! On espère que les villes françaises mettront ce guide en application et que le vélo pourra enfin séduire une grande majorité d’usagers.
Article rédigé par Célia Foulon – Consultante
Sources : [1] Guide des aménagements cyclables de Paris en Selle [2] Article du Citylab
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