inondation luxembourg
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22 mai 2025
Auteurs et autrices : Christina Stuart, Romain Grandjean

À l'abri des inondations ? Regards sur le nouveau plan d’adaptation au changement climatique du Luxembourg

Analyse du Projet de Stratégie et plan d’action pour l’adaptation aux effets du changement climatique au Luxembourg

Introduction

Les 14, 15 et 16 juillet 2021 ont été marqués par la catastrophe naturelle la plus coûteuse de l’histoire au Luxembourg : 133 millions d’euros d’aide financière aux victimes ont été versés par les assureurs et 30,4 millions[1] d’euros payés par l’État. Cette inondation n’était pas un cas isolé. D’après le LIST[2], la température moyenne au Luxembourg a augmenté de plus d’1°C depuis les années 1960. Les effets du changement climatique qui en résultent et dont nous sommes régulièrement témoins partout dans le monde, vont s’intensifier à la fois en fréquence et aussi en gravité représentant des risques très sérieux pour les infrastructures, la santé des populations, ainsi que les activités économiques dans leur ensemble. 

C’est dans ce contexte que le Ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité publie un projet de Stratégie et plan d’action pour l’adaptation aux effets du changement climatique au Luxembourg pour la période 2025-2035. Ce document vise à guider les acteurs publics et privés afin qu’ils se préparent à ces risques et s’en protègent autant que possible.

Dans cet article, nous vous proposons un court décryptage de ce nouveau plan : ses avancées, ses prochaines étapes, et la manière dont les acteurs économiques — industriels, acteurs financiers, opérateurs de services — peuvent s’en saisir, à condition de s’appuyer sur des méthodes robustes.

De réelles avancées

Pour commencer, il faut saluer l’existence même de la démarche entreprise : compte tenu du caractère systémique et multi-dimensionnel des risques engendrés par le dérèglement climatique, se doter d’une stratégie d’adaptation est incontournable pour établir une vision partagée des enjeux, coordonner les acteurs clés et faciliter la structuration de leurs actions d’adaptation dans le temps.

Prenons l’exemple d’une entreprise fictive dans le numérique “Adapt-IT” qui a des data centers au Luxembourg, et dépend aussi de serveurs aux Etats-Unis. Elle est exposée à des aléas climatiques qui pourraient affecter ses propres bureaux et data centers locaux et à l’international, mais aussi les services essentiels - rendus par d’autres acteurs - et dont elle dépend (ex : approvisionnement en eau pour les systèmes de climatisation, disponibilité d’énergie pour faire fonctionner les serveurs, disponibilité des routes pour que les employés puissent se rendre sur leur lieu de travail etc.). Par ailleurs, afin d’établir un diagnostic de risques, “Adapt-IT” devra croiser ses données internes (ex : géolocalisation et analyse de sensibilité de ses data centers aux aléas climatiques) avec des données extérieures, produites par des tiers (ex : les projections d’évolution des aléas climatiques) et spécifiques à chaque territoire. Elle devra enfin distinguer les leviers d’action directs de ceux qui relèvent d’autres acteurs (ex : fournisseurs, prestataires, territoires, filières). Sans une vision systémique, spécifique et partagée des risques, les diagnostics restent partiels, les plans d’action peu opérants, et les investissements mal orientés.

Les risques physiques liés aux aléas climatiques peuvent impacter toute la chaîne de valeur d’une organisation (ex : pénurie de matériaux des fournisseurs, hausse des coûts d’assurance pour les opérations sur site et hausse des coûts de transport vers le client final)

Le nouveau Plan national d’adaptation luxembourgeois répond à ces enjeux avec une ambition nettement renforcée. Par rapport à la précédente version (2018–2023), il élargit son périmètre – 16 champs d’action couverts contre 13 précédemment – et structure un ensemble de 131 mesures concrètes. Plusieurs nouveaux domaines font leur apparition, tels que la protection des sols, la coopération régionale et internationale, ou encore l’éducation, la communication et la sensibilisation, témoignant d’une approche plus transversale et systémique.

Le plan se distingue également par une gouvernance plus opérationnelle, articulée autour d’un cycle d’adaptation en cinq étapes (évaluer, planifier, mettre en œuvre, suivre, ajuster) et par une volonté explicite de territorialiser l’action. Des dispositifs comme les Pactes Climat et Nature visent à engager les communes dans la déclinaison locale du plan, tandis que des outils de planification tels que les concepts communaux d’adaptation sont encouragés.

Le plan met en avant les solutions fondées sur la nature comme axe structurant de l’adaptation. Qu’il s’agisse de gérer les excès d’eau, de limiter les effets des sécheresses ou de rafraîchir les villes, ces solutions constituent une réponse à la fois écologique, résiliente et économiquement soutenable.

Enfin, le Ministère présente au public ce projet de stratégie d’adaptation pour « affiner les mesures proposées, intégrer de nouvelles idées et mesures et pour mobiliser et adhérer tous les acteurs à la stratégie d’adaptation »[1].

Ce plan pose donc les bases d’une stratégie d’adaptation cohérente, intégrée, et potentiellement transformative – à condition toutefois de pouvoir s’appuyer sur des méthodes concrètes pour la mise en œuvre à l’échelle des organisations et des territoires.

Les prochaines étapes

Malgré ces avancées, afin d’être efficace dans sa mise en œuvre il faudrait accompagner ce plan d’un calendrier opérationnel et d’un cadre méthodologique clair.

Premièrement, le plan pourrait apporter plus de précisions par rapport au budget et le calendrier opérationnel. Le calendrier doit notamment prendre  en compte le fait que certaines entreprises n’ont encore jamais abordé les sujets d’adaptation, et nécessitent donc un accompagnement renforcé.

Deuxièmement, le plan pourrait être accompagné d'un cadre méthodologique clair pour guider les organisations dans l’évaluation de leur exposition aux risques climatiques. Pour garantir la qualité des diagnostics et des plans d’adaptation, il est essentiel de définir les caractéristiques d’une évaluation rigoureuse, structurée, et homogène entre acteurs.

Troisièmement, pour être exhaustif, ce plan pourrait intégrer une approche spécifique pour les scénarios de choc climatique à fort impact : combinaisons rares mais plausibles d’aléas extrêmes, susceptibles de désorganiser des systèmes vitaux ou de provoquer des ruptures critiques dans certaines chaînes de valeur. Ce type d’analyse, encore peu développé, mériterait un effort concerté entre acteurs publics et privés.

OCARA : une méthode éprouvée au service des acteurs économiques

Dans ce contexte et face aux objectifs fixés par le plan, la méthode OCARA constitue un cadre d’analyse solide pour aborder la question de l’adaptation. Elle permet non seulement d’alimenter les référentiels de reporting comme la CSRD, mais surtout de construire des trajectoires d’adaptation concrètes, spécifiques à chaque acteur, en cohérence avec les grands principes évoqués dans le plan national. Cette méthode est publique et disponible sur notre site internet.

Exemple de diagnostic de risques climatiques pour un processus d’une entreprise : l’approvisionnement en lait (méthode OCARA)

Forts de plus de dix ans d’expérience aux côtés d’acteurs économiques de tous secteurs, nous avons acquis une expertise reconnue dans l’évaluation des risques liés à la dérive climatique et l’élaboration de plans d’adaptation, à l’échelle des sites comme à celle des groupes. Aujourd’hui, nous menons des diagnostics de risque climatique chez nos clients, nous les aidons à structurer leur stratégie d’adaptation, à se former et à s’outiller pour mettre en œuvre concrètement le réflexe Adaptation.


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Portrait de Christina Stuart
Christina Stuart
Responsable de Carbone 4 Luxembourg
Portrait de Romain Grandjean
Romain Grandjean
Senior Manager / Responsable de pôle